Sous-sections

3.2 Hypothèses pour un outil de modélisation 3D «créatif»

À partir de l'étude du domaine et des besoins que nous avons présentés dans les deux premiers chapitre de ce mémoire, nous formulons des hypothèses de trois ordres quant à la réalisation d'un système informatique de modélisation 3D pour les premières phases de la conception architecturale, un outil de modélisation 3D «créatif». Ces hypothèses sur l'interface, les interactions et la démarche d'utilisation guideront nos travaux depuis une étude de la tâche jusqu'à la réalisation du prototype.

3.2.1 Importance de la métaphore

Il nous parait tout d'abord primordial d'utiliser une métaphore qui suggère au plus proche les caractéristiques de l'environnement de conception habituel de l'architecte. Les métaphores courantes qu'emploient les interfaces WIMP telles que le bureau comme espace de travail, les boutons pour représenter une action ou les onglets pour manipuler différents documents ne nous semblent pas en adéquation avec les gestes et techniques habituels au concepteur.

Notre hypothèse est donc de fournir un environnement de travail instrumenté, utilisant des dispositifs et des techniques d'interaction particuliers et appropriés aux actions à réaliser (un stylet pour dessiner, des techniques de manipulation directe pour utiliser des calques, etc.), mais aussi des représentation graphiques et logiques adaptées (feuilles, traits).

Ce principe d'interface écologique, où les actions possibles sont clairement visibles et directement accessibles, tient selon nous une place importante dans la conception d'un système qui ne «bride» pas la créativité des utilisateurs.

3.2.2 Prépondérance du dessin

Nous avons souligné l'importance du dessin comme outil figuratif de la conception, et l'intérêt qu'il a alors suscité pour les interfaces de modélisation 3D. Cette activité des tâches créatives «traditionnelles» (conception, architecture, art, etc.) est donc aussi devenu une activité des tâches créatives informatisée. Nous nous inscrivons dans la même démarche, considérant que le dessin doit être le mode de saisie privilégié, mais aussi et surtout un mode de communication entre l'homme et la machine dans le cadre d'outils pour la conception créative.

Dès lors, il est important de proposer des possibilités similaires aux techniques et activités du dessin dans le cadre de tâche traditionnelles de conception créative:

La médiatisation de ces activités de base peut permettre de transposer la notion de dialogue qui existe entre le dessinateur et son dessin si tant est que les interactions et les représentations proposées soient habituelles (épaisseur et variation des traits, touché de la pointe, brosse, etc.). Mais il est aussi primordial que d'éventuelles activités complémentaires, induites par l'emploi d'outils informatiques et la tâche qui en découle, ne brisent pas non plus ce dialogue privilégié et n'interfèrent donc pas avec le dessin.

Le système doit donc être fondé sur des interactions cohérentes, essentiellement à base de dessin et de manipulation directe du contexte (selon le même principe que, avec une feuille et un crayon, la main dominante dessine et l'autre manipule la feuille [Guiard1987]).

3.2.3 Liberté d'action

La démarche de création doit être laissée au libre choix de l'utilisateur. Ainsi, le système, de son interface à son noyau fonctionnel, doit s'adapter à la démarche du concepteur et non l'inverse. Cette notion de liberté est essentielle pour l'exploration, indispensable à la création. Ce qui n'exclut toutefois pas d'éventuelles aides dans cette démarche exploratoire, mais sans contraindre ni imposer.

Du point de vue du dessin, nous considérons qu'aucune contrainte de vue ou de style ne doit être imposée. Dès lors, dans le cadre de la construction de modèles 3D, le système doit être capable d'interpréter des dessins en vue perspective (cas général) à main levée, imprécis et révisés de manière itérative: des croquis en perspective.
Cette hypothèse peut paraître en contradiction avec ce que nous avions évoqué sur la préférence des architectes pour l'utilisation de croquis en plans et coupes [Estevez2001]. Il s'avère que nous retrouvons tout de même beaucoup de croquis en perspective sur les dessins d'architectes dans les premières phases de la conception. Dès lors, il doit être possible de faire cohabiter ces deux techniques, dans des buts différents3.1.

Du point de vue de l'interface et des interactions, cette hypothèse se traduit par la nécessité pour le système de comprendre au mieux les actions de l'utilisateur afin de s'y adapter. Deux approches sont alors possibles: proposer implicitement les outils adaptés à l'activité courante, ou rendre les outils disponibles à tout moment.

Ces hypothèses soulignent l'importance que va tenir le dessin comme vecteur de communication entre l'utilisateur et le système informatique, mais aussi l'importance de comprendre l'activité de dessin afin de s'y adapter. C'est pourquoi, dans la suite de ce chapitre, nous présentons une étude originale du dessin architectural en perspective. Les résultats des analyses de cette étude, associés à la reprise des hypothèses que nous venons d'énoncer, nous permettront d'établir les quatre lignes directrices pour la conception de notre système.

stuf
2005-09-06