Faut-il avoir peur de l'anthropophagie ?
Résumé
L'anthropophagie a d'abord été une pierre scandaleuse : l'éclat du manifeste de 1928 et l'esprit soufflant sur ses productions collatérales : la Revue de la première dentition, la page hebdomadaire du Diário nacional de la seconde… avant de se convertir dans les révisions philosophiques d'après 1945, la critique du messianisme chrétien, les thèses sur le matriarcat, la marche des utopies. C'est en mai 1928 que s'accomplit, par le Manifeste pour l'essentiel, le big-bang d'où allaient naître plusieurs comètes, planètes, constellations : le concrétisme, le tropicalisme, la poésie marginale ou encore le Teatro Oficina… pour ne parler que du Brésil, et non des rebondissements internationaux dont ces journées sont un effet. Et les résistances à l'anthropophagie d'Oswald de Andrade, qui se sont exprimées au cours de cette rencontre, sont plutôt bon signe : signe que le Manifeste est encore actif, scandaleux, en dépit de sa valeur désormais patrimoniale. En outre, puisque nous ne sommes pas encore devant un texte inerte, il nous est impossible de nous prosterner devant lui dans une attitude fidèle et pieuse, impossible d'en arrêter une fois pour toutes un sens, le sens. Le problème est que dans le même temps qu'il résiste à la muséification, les multiples messages attribués à ce Manifeste n'excluent ni la réduction ni le malentendu. D'où notre effort pour « mordre dedans », désemboîter ses sens, avant d'en pointer un des pôles de sa puissance subversive : le travail rhétorique et le dessein métonymique.
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