Les images d'un effacement. : Le passé entre écriture et iconiture - TEL - Thèses en ligne Accéder directement au contenu
Thèse Année : 2023

The images of an erasure : The past between writing and iconiture

Les images d'un effacement. : Le passé entre écriture et iconiture

Résumé

After a short period of fruitful dialogue between semiotics and historiography or the philosophy of history in the 1960s and 1970s, today we can only note the almost total absence of any exchange between these disciplines. Given the many methodological and epistemic challenges that they share and seek to address, this situation may seem paradoxical, even more so in an era when interdisciplinarity is the main objective that runs through the field of humanities and social sciences. If we began with this observation, it is because the corpus of our research immediately confronted us with this problem. A corpus composed of photo albums, made by photographers coming from the four corners of the world to evoke the memory of the traumatic heritage they have in common: the Armenian genocide. We were faced with a complex semiotic object. The background of the actors was as important as the figure they imposed, and the form of life, the strategies and tactics mobilized as valuable as the visual statement they produced. We were also faced with a complex historical object, which questioned the meaning of the past, projected the erased traces of its reality and wove an iconic discourse on its truth. The current semiotic tools allow us to describe it in all its complexity. But their heuristic value concerning historical experience is far from being perceived or valued by the historiographic institution.The resumption of the dialogue between semiotics and history has become the methodological imperative of our thesis, without which the analysis of our corpus could only have been partially carried out. A revival beyond the structuralism that had occupied the scene, but also beyond the narrative and scriptural turn that had dominated the reflection around historiography, and finally, beyond the strictly epistemic stakes that dominate the historiographic field. History is written, but the corpus shows us that it is also shown. History aims at understanding the past, but the corpus reminds us of the importance of its description and its monstration. The history leans on documents that it configures, but the corpus suggests us that it generates in parallel another fight by a dialectic between figure and bottom, led by the inherited, sublimated or still invented images. A radical resumption of the dialogue, not only with historiography, but also with visual studies and visual anthropology. A dialogue that is above all inter-object (object-image, object-narrative) and inter-discursive (visual, verbal). A recovery that seeks to find the dialogical potential between the marginal and mute object that is the photo, and the experience of the past in its entirety. The analysis of the corpus and the perspective of a new dialogue are the two red threads that cross our research, one feeds on the other, testing its limits. Together, they dig the semiotic space of this experience where the reality and the truth of the past are inseparable from their figures and the discourse woven. Such an objectal, discursive and semiotic interdisciplinarity required a new definition of the image, beyond the notion of configuration or representation. We thus question the practical dimension of images and their polyconicity in the light of the dialectic between enunciation and perception, and the different forms that result from it. Such a definition finally brought us on the ground of the discourse of the image, of its syntax composed of a line-point, and of its own technicality, which we call iconiture. It is thus that these photo objects, at the margin, become the generators of a new process of iconic writing, which allows to install the past where it should be: between writing and iconiture.
Après une courte période d’un dialogue fructueux entre la sémiotique et l’historiographie ou la philosophie de l’histoire dans les années 60 et 70, aujourd’hui on ne peut que constater l’absence presque totale de tout échange entre ces disciplines. Vu les nombreux défis méthodologiques et épistémiques qu'elles partagent et cherchent à relever, cette situation peut paraître paradoxale, encore plus dans une époque où l’interdisciplinarité est l’objectif principal qui traverse le champ des sciences humaines et sociales. Si nous avons commencé par ce constat, c’est parce que le corpus de notre recherche nous a mis d’emblée devant cette problématique. Un corpus composé d'albums photos, réalisés par des photographes venant des quatre coins du monde pour évoquer la mémoire de l’héritage traumatique qu’ils ont en commun : le génocide des arméniens. Nous étions face à un objet sémiotique complexe. L'arrière fond des acteurs avait autant d’importance que la figure qu’ils ont imposée, et la forme de vie, les stratégies et les tactiques mobilisées autant de valeur que l’énoncé visuel qu’ils avaient produit. Nous étions également face à un objet historique complexe, qui interrogeait le sens du passé, projetait les traces effacées de sa réalité et tissait un discours iconique sur sa vérité. Les outils sémiotiques actuels nous permettent de le décrire dans toute sa complexité. Mais leur valeur heuristique concernant l’expérience historique est loin d’être perçue ou valorisée par l’institution historiographique.La reprise du dialogue entre la sémiotique et l’histoire est devenue l’impératif méthodologique de notre thèse, sans laquelle, l’analyse de notre corpus n'aurait pu qu’être partiellement menée. Une reprise au-delà du structuralisme qui avait occupé la scène, mais aussi au-delà du tournant narratif et scripturaire qui avait dominé la réflexion autour de l’historiographie, et enfin, au-delà des enjeux strictement épistémiques qui dominent le champ historiographique. L’histoire s’écrit, mais le corpus nous montre qu’elle se montre également. L’histoire vise la compréhension du passé, mais le corpus nous rappelle l’importance de sa description et de sa monstration. L’histoire s’appuie sur des documents qu’elle configure, mais le corpus nous suggère qu’elle génère parallèlement un autre combat par une dialectique entre figure et fond, menée par les images héritées, sublimées ou encore inventées. Une reprise radicale du dialogue, non seulement avec l’historiographie, mais aussi avec les études visuelles et l’anthropologie visuelle. Un dialogue qui est surtout inter-objectal (objet-image, objet-récit) et inter-discursif (visuel, verbal). Une reprise qui cherche à trouver le potentiel dialogique entre l’objet marginal et muet qu'est la photo, et l’expérience du passé dans sa globalité. L'analyse du corpus et la perspective d’un nouveau dialogue sont les deux fils rouges qui traversent notre recherche, l’un se nourrit de l’autre, met à l'épreuve ses limites. Ensemble, ils creusent l’espace sémiotique de cette expérience où la réalité et la vérité du passé sont inséparables de leurs figures et du discours tissé. Une telle interdisciplinarité objectale, discursive et sémiotique nécessitait une nouvelle définition de l’image, au-delà de la notion de la configuration ou de représentation. Nous interrogeons ainsi la dimension pratique des images et leur polyconicité à l’aune de la dialectique entre énonciation et perception, et les différentes formes qui en découlent. Une telle définition nous a finalement amené sur le terrain du discours de l’image, de sa syntaxe composée d’une ligne-point, et de sa propre technicité, que nous appelons iconiture. C’est ainsi que ces objets-photos, à la marge, deviennent les générateurs d’un nouveau processus d’écriture iconique, qui permet d’installer le passé là où il devrait être : entre écriture et iconiture.
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Origine : Version validée par le jury (STAR)

Dates et versions

tel-04115725 , version 1 (02-06-2023)

Identifiants

  • HAL Id : tel-04115725 , version 1

Citer

Razmik Haboyan. Les images d'un effacement. : Le passé entre écriture et iconiture. Linguistique. Université Lumière - Lyon II, 2023. Français. ⟨NNT : 2023LYO20004⟩. ⟨tel-04115725⟩
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