, Guizot ajoute ensuite : « Maintenant, Messieurs, comparez ces deux listes, si incomplètes, si sèches, d'auteurs et d'ouvrages ; n'est-il pas vrai que les noms, les titres seuls expliquent la différence de l'état intellectuel des deux sociétés ?, p.164

L. Stendhal, . Rouge, and . Le-noir, Chronique de 1830, op. cit, p.188

. Le-moyen, Âge lui-même, qui allait sans voir ; c'est une étude, un essai, un voyage de découverte » 611 . Car l'écriture historique du début du XIX e siècle est lucide : la perte est irrémédiable, le manque un objet avec lequel il faut composer l'histoire. « Jamais le livre ne nous rendra cette parole vivante, cette symphonie qui s'agrandit à chaque leçon

. La-voix-de-l'histoire, historien constitue moins l'objet du récit historique que son mouvement. « L'histoire est connaissance mutilée », comme l'écrivait Paul Veyne 613 ; au début du XIX e siècle, l'écriture historique tend moins à cacher cette mutilation qu'à en trouver une utilité méthodologique

J. Michelet, C. Au-collège-de, and F. , , vol.2, p.146

A. Dumesnil, . Lettre-À-eugène, and . Noël, cité dans Jules Michelet, vol.3, p.654

P. Veyne, Comment on écrit l'histoire, op. cit, p.26

J. Michelet, Histoire de France, t. 1, op. cit, p.230

B. Honoré-de, Une ténébreuse affaire, op. cit., p. 105. C'est nous qui soulignons

G. Picon and . Michelet, , p.32

J. Michelet, Histoire de France, t. 1, op. cit, pp.127-128

A. Thierry, Lettres sur l'histoire de France, op. cit, p.47

G. Sand and C. La-comtesse-de-rudolstadt, , p.127

. François-rené-de-chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, cité dans Anne-Sophie Morel, Chateaubriand et la violence de l'histoire dans les Mémoires d'outre-tombe, pp.206-207

A. Dumas and L. Chevalier-de-maison-rouge, , p.380

J. Michelet, Histoire de la Révolution française, t. 1, op. cit, p.424

A. Dumas, L. Borgia, and O. , Celui qui regarde ces vieux usages flamands du haut de la sagesse moderne, écrit-il par exemple, n'y verra sans doute qu'un jeu déplacé dans les choses sérieuses, les amusements juridiques d'un peuple artiste, des tableaux en action, souvent burlesques, les Téniers du droit? D'autres, avec plus de raison, y sentiront la religion du passé, la protestation fidèle de l'esprit local? Ces signes, ces symboles, c'était pour eux la liberté, sensible et tangible ; ils la serraient d, p.53

. L'un, des emplacements privilégiés par les historiens pour rendre compte du réel, probablement parce qu'il rend possible la plupart des attitudes citées ci-dessus

. Écran-qui-cache, Louis XI observe la demeure du bailli prenant feu, qu'il identifie à la fin de la féodalité, à partir d'une fenêtre de la Bastille 813 . Le Docteur Noir, dans Stello, qui revendique son « métier chéri d'observateur », se considérant comme « l'impassible spectateur des choses », observe de même le 5 Thermidor depuis sa fenêtre qui donnait sur la place de la Révolution 814 , tandis que c'est également par une fenêtre qu'il assistera à l'exécution de Chénier 815, vol.812

P. Petitier and J. Michelet, L'homme histoire, p.382

J. Michelet, Histoire de France, t. 5, op. cit, p.253

A. Del-lungo and L. Fenêtre, Sémiologie et histoire de la représentation littéraire, Éditions du Seuil, p.12, 2014.

V. Hugo, , p.617

A. De-vigny and . Stello, , p.112

A. Thierry, Dix ans d'études historiques, op. cit., p. XXIII

J. Michelet, C. Au-collège-de, and F. , , p.359

F. Guizot, Cours d'histoire moderne, t. 1, op. cit, p.392

. Stendhal, Vie de Napoléon, p.121

E. François-rené-de-chateaubriand and . Historique, , p.14

, mouvant, si bien que la réalité elle-même qui défile sous les yeux du lecteur change et perd en stabilité. « L'auteur, écrit Béatrice Didier en introduction aux Chroniques italiennes, semble surtout avoir voulu donner un effet de perspective, p.31

. Stendhal, Stendhal simple traducteur ; le chroniqueur italien, les personnages » 920 . Guizot voit dans cette manière d'écrire l'histoire l'avantage d'ancrer bien mieux ses lecteurs dans ce qui fait la spécificité de l'histoire, c'est-à-dire son impermanence

, Guizot se méfie de ce qui apparaît sous ses yeux et en appelle à la pluralité des perspectives et des regards pour comprendre un homme dont la fin de l'existence ne saurait résumer entièrement sa vie : Nous le connaissons alors, mais dans son ensemble, tel qu'il est sorti en quelque sorte

C. Là, Messieurs, l'erreur où sont tombés la plupart des historiens ; parce qu'ils ont acquis une idée complète de l'homme, ils le voyent tel dans tout le cours de sa carrière, p.921

, Mais il propose toujours de reconstituer les différentes étapes, le cheminement qui a permis d'aboutir à une réalité d'ensemble qu'il expose par ailleurs. L'historien s'en sert comme d'un outil pédagogique qui permet d'exercer le regard du lecteur et l'autorise à mieux appréhender ce qui relève du similaire et ce qui relève de l'étrangeté. « Je vous le demande, dit-il à ses élèves après avoir abordé la société féodale, l'église et les communes après la chute de l'Empire romain ; reconnaîtrez-vous la société que nous venons de voir au 12 e ? Quelle immense différence ! » 922 . Mais l'observation du cheminement et non seulement des résultats permet également à Guizot d'intéresser le lecteur et de rendre son récit vivant, car mouvant, changeant et pris parfois par l'incertitude. La variation des perspectives permet ainsi à l'historien de donner du mouvement à une histoire lente qui risquerait par conséquent d'ennuyer le lecteur : Si on ne la considérait pas sous ce point de vue, écrit-il à propos de la société du XII e siècle, si on n'y cherchait pas surtout ce qui en est sorti, Guizot refuse donc d'offrir seulement une vue d'ensemble. Lorsqu'il la donne, il précise alors qu'il s'agit là d'un tableau historiquement faux, qui n'a comme seule commodité que de permettre une meilleure intelligibilité du propos et une plus grande transmissibilité de l'histoire

, Béatrice Didier, introduction à Stendhal, Chroniques italiennes, p.18

F. Guizot, Histoire de la civilisation en Europe et en France, « 6 ème leçon -23 mai 1828, pp.24-25

. Ibid, « 8 ème leçon -6 juin 1828, p.6

F. Guizot, Cours d'histoire moderne, t. 1, op. cit, pp.272-283

J. Berchet and . Préface-À-françois-rené-de-chateaubriand, , p.38

C. Bernard and L. Passé, , p.77

V. Hugo, Quatrevingt-Treize, cité par ibid, p.136

, Le chapitre 14 de la seconde partie du livre premier finit d'ailleurs par ces mots : « Je laisse parler le bon Amyot, p.479

E. François-rené-de-chateaubriand and . Historique, , p.71

, Une attitude de recul, qui consiste à s'extraire (au moins mentalement) pour observer depuis une position temporelle et sociologique ; une attitude de focalisation, par laquelle on choisit de s'enfermer dans le contexte de pertinence délimité par la question ». Ivan Jablonka, L'histoire est une littérature contemporaine, p.165

F. Genette, C. Iii, N. Dans, and . Piégay-gros, Le lecteur, op. cit, pp.23-24

P. Hamon, ». Un-discours-contraint, R. Dans, and . Barthes, Philippe Hamon, Michael Riffaterre et Ian Watt, Littérature et réalité, op. cit, p.141

F. Guizot, Essais sur l'histoire de France, op. cit, p.209

E. François-rené-de-chateaubriand and . Historique, , p.486

J. Michelet, Précis de l'histoire de France, op. cit, p.249

C. Bernard, Introduction à Honoré de Balzac, Les Chouans, op. cit, p.32

, Je ne suis plus bien jeune, et je me suis tiré d'affaire ; je ne sais trop si mon successeur s'en tirera ; au surplus, cela le regarde? Savez-vous, Docteur, qu'avec mon air insouciant je suis tout au moins un homme de sens, p.1017

. Quant-À-napoléon, . Le-capitaine-renaud-de-servitude, and . Le-montre-tantôt-comme-un-empereur, pas d'oreilles pour entendre autre chose que les actions de l'Empereur, la voix de l'Empereur, les gestes de l'Empereur, les pas de l'Empereur » 1018 ) tantôt comme un individu : « Je ne tardai pas à trouver des occasions de l'examiner de plus près, et d'épier l'esprit du grand homme, dans les actes obscurs de sa vie privée » 1019 . De mort et condamné le duc d'Enghien peut également devenir juge de Napoléon, comme l'écrit Chateaubriand dans ses Mémoires d'outre-tombe : Mais ce que dans son orgueil il n'avouera point aux vivants, il est contraint de le confesser aux morts, écrit Chateaubriand à propos de Napoléon. Ce Prométhée, le vautour au sein, ravisseur du feu céleste, se croyait supérieur à tout, Mais je n'avais pas d'yeux pour voir

, cette voix que tous les siècles entendront », avant de faire parler Napoléon de son entrevue avec Suleiman, Ibrahim et Muhamed 1022 . À la manière d'un dramaturge ou d'un metteur en scène, l'historien peut moduler les rôles des personnages pour mieux éclaircir la scène de l'histoire. Il pose et impose des hypothèses, c'est-à-dire des fictions au coeur du récit, pour élaborer une histoire faite de potentialités et d'incertitudes, c'est-à-dire de libertés et de choix. Cette histoire dans laquelle le réel vient s'entremêler aux fictions répond aux besoins des lecteurs, comme l'analyse Alfred de Vigny dans les « Réflexions sur la vérité dans l'art » : « Nous trouverons dans notre coeur plein de trouble, où rien n'est d'accord, deux besoins qui semblent opposés, mais qui se confondent, à mon sens, Napoléon aussi peut se faire entendre par-delà la mort et renaître au sein du récit de l'historien, dans un piège énonciatif que lui tend habilement l'historien 1021 : « Écoutons dans les entrailles d'un sépulcre, écrit Chateaubriand

A. De-vigny and . Stello, , p.57

A. De and V. , Servitude et grandeur militaires, op. cit, p.174

. François-rené-de-chateaubriand, , p.205

. «-l'empereur, se voit pris au piège subtil d'une parole qu'on lui prête pour mieux en souligner la duplicité, et d'un discours qui lui échappe et le met en accusation. C'est un piège énonciatif que lui tend le mémorialiste, p.197

. François-rené-de-chateaubriand, , pp.376-377

, Mirabeau aussi s'est vendu. Napoléon avait volé des millions en Italie, sans quoi il eût été arrêté tout court par la pauvreté, comme Pichegru. La Fayette seul n'a jamais volé. Faut-il voler, faut-il se vendre ? pensa Julien. Cette question l'arrêta tout court, Que serait Danton aujourd'hui, dans ce siècle des Valenod et des Rênal ? pas même substitut du procureur du roi?, p.1024

, Ce parlement mobile constitue donc un allié dont les voix parfois envahissantes exigent d'être maîtrisées ; pour ne pas perdre celui qui serait tenté de s'ouvrir à elles, elles doivent s'inscrire dans le cadre d'un projet historiographique, c'est-à-dire d'un récit. L'histoire sans narrateur et sans historien opère une imbrication des temporalités sans attache et sans point d'ancrage. Julien s'y perd, lui qui ne lit le réel qu'à travers l'histoire, réduisant la polyphonie pour en faire l'instrument d'un regard unique : le sien. S'imaginant saisi par des domestiques et bâillonné, il regarde la famille de La Mole et la réinterprète entièrement à partir d'une lecture historique : Quels sont ceux qu'on a choisis pour l'expédition de cette nuit ? se disait-il. Dans cette famille, les souvenirs de la cour de Henri III sont si présents

A. De and V. , Réflexions sur la vérité dans l'art », dans Cinq-Mars, op. cit, p.23

L. Stendhal, . Rouge, and . Le-noir, Chronique de 1830, op. cit, p.300

B. Honoré-de, L'envers de l'histoire contemporaine, op. cit, p.35

V. Hugo and O. Han-d'islande, , p.111

. «-quoique-vous-ne-soyez-ici-que-d'hier, . Dit-mme-de-la-chanterie, M. Dans-le-monde, . Nicolas, and . Marquis-de-montauran, Joseph celui de Lecamus, baron de Tresnes ». Honoré de Balzac, L'envers de l'histoire contemporaine, op. cit., p. 50. parole » 1050 . Si bien qu'étranger à soi-même, le sujet peut s'identifier à d'autres vies que les siennes et créer ainsi de la continuité entre les temps

, Narration et citation s'emmêlent et se confondent par conséquent dans l'écriture de Chateaubriand, donnant à lire une histoire dont le narrateur est pluriel et indéterminé : « C'est que pour évoquer sa carrière politique, écrit par exemple Jean-Claude Berchet, Chateaubriand avait du mal à choisir entre la citation directe de « pièces justificatives » et la narration proprement dite. De nombreuses traces ont subsisté de ces hésitations » 1052 . Les Mémoires sont par conséquent polyphoniques en ce sens qu'un parlement dense s'y fait entendre, ainsi que des discussions parfois vives, des adresses et des échanges, des narrations multiples. Dans le deuxième tome des Mémoires d'outre-tombe, l'écrivain mêle ainsi sa narration à celle de son domestique Julien avec qui il est parti, et qui lui-même composait une narration de ce voyage : « Le petit manuscrit qu'il met à ma disposition servira de contrôle à ma narration : je serai Cook, il sera Clerke, « Ici je vous transcrirai deux pages de la vie du duc de Berry, écrit par exemple Chateaubriand dans ses Mémoires, c'est toujours vous raconter la mienne » 1051

, L'éloge que fait Chateaubriand d'Augustin Thierry illustre bien ce travail à la fois personnel et collectif qui ressort dans cette pluralité vocale des Mémoires et des autres ouvrages de l'écrivain : Je vous citerai beaucoup, monsieur, dans le travail que je prépare depuis tant d'années sur les deux premières races. Je mettrai à l'abri mes idées et mes recherches derrière votre haute autorité ; j'adopterai souvent votre réforme des noms ; enfin j'aurai le bonheur d'être presque toujours de votre avis, en m'écartant, bien malgré moi sans doute, du système proposé par M. Guizot ; mais je ne puis, avec cet ingénieux écrivain, renverser les monuments les plus authentiques, Afin de mettre dans un plus grand jour la manière dont on est frappé dans l'ordre de la société et la hiérarchie des intelligences, je mêlerai ma narration à celle de Julien » 1053

, On retrouve d'ailleurs un procédé similaire dans le Précis d'histoire de France de Jules Michelet : « Dans cette page et les deux suivantes, précise l'historien en note de bas de page, nous suivons presque toujours et quelquefois nous copions, les Lettres sur l'hist

J. Berchet and . Préface-À-françois-rené-de-chateaubriand, , p.37

I. François-rené-de-chateaubriand, , p.627

J. Berchet, Notice des livres XXV à XXXIII, op. cit, p.15

. François-rené-de-chateaubriand, , p.250

. François-rené-de-chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. 1, op. cit, pp.319-320

, elles se sont déroulées devant moi ; une certaine couleur de contemporanéité, vraie dans le moment qui s'écoule, fausse après le moment écoulé, s'étend donc sur le tableau » 1058 . C'est pourquoi le récit historique se fait voyage, et c'est pourquoi le parlement est mobile et n'appelle pas seulement à la parole l'auteur et ses contemporains. Pour procéder au déracinement, le récit historique du début du XIX e siècle se dote d'une écriture polyphonique et voyageuse qui destitue l'auteur et l'auctorialité au profit du narrateur-historien, donnant à entendre ce que Chateaubriand appelle la « chaîne de l'histoire commune » 1059 . Autrement dit, pour reprendre une formulation balzacienne, ce parlement mobile de l'histoire fonctionne comme un outil méthodologique qui permet à l'historien de ne plus seulement montrer l'endroit mais également l'envers de l'histoire, c'est-à-dire toute sa pluralité. C'est le projet de Chateaubriand dans ses Mémoires, qui résonne avec le projet historiographique de la discipline historique qui se constitue alors : Je vous fais voir l'envers des événements que l'histoire ne montre pas : l'histoire n'étale que l'endroit. Les Mémoires ont l'avantage de présenter l

, C'est à cette même ambition de présenter l'envers de l'histoire napoléonienne que Las Cases se réfère dans son intention de publier le Mémorial de

, de ses actes, de ses monuments ; mais personne ne connaît les nuances véritables de son caractère, ses qualités privées, les dispositions naturelles de son âme : or, c'est ce grand vide que j'entreprends de remplir ici

, exigent de l'historien qu'il ne soit pas seul dans son travail. S'il y a un parlement mobile de l'histoire, il trouve ainsi son origine dans la communauté d'historiens qui se forme alors, et dans la transformation des lecteurs en apprentis historiens par ceux qui écrivent l'histoire, Cet envers et cet endroit de l'histoire, qui transparaissent dans l'utilisation polyphonique du récit

. François-rené-de-chateaubriand, , p.558

. «-c'est, une erreur de croire que les révolutions, les accidents renommés, les catastrophes retentissantes, soient les fastes uniques de notre nature : nous travaillons tous un à un à la chaîne de l'histoire commune, et c'est de toutes ces existences individuelles que se compose l'univers humain aux yeux de Dieu ». François-René de Chateaubriand, p.149

, Au fond de lui gronde une autre révolution depuis que lui a été révélé, au Collège de France, le pouvoir de la parole de vie, tel qu'il le définit en écoutant Danton maîtriser de la voix une bande de femmes furieuses : « Qu'on ne me dise pas que la parole soit peu de choses en de tels moments. Parole et acte, c'est tout un. La puissante, l'énergique affirmation qui assure les coeurs, c'est une création d'actes ; ce qu'elle dit, elle le produit. L'action est ici servante de la parole, p.40

, L'historiographie qui a comme ambition de refléter cette pluralité tout en restant intelligible doit par conséquent moins se construire sous le modèle de l

. Michelet, Le Moyen Âge fut un unisson discordant, affirme Michelet ; nous, nous sommes un concert de mille voix, de bruyantes discussions sur des nuances, la discorde étouffée sur le fond. L'unité est l'ennemie de l'union. L'unité, c

J. Michelet, C. Au-collège-de, and F. , , vol.2, p.195

A. De-vigny and . Stello, , p.79

P. Viallaneix, ». Professeur-d'histoire-et-de-morale, P. , and J. Michelet, , vol.1, p.61

, que les juxtaposer pour rendre compte d'une histoire qui n'existe pas sans le regard que posent sur elle ses différents acteurs et spectateurs. Lorsque Chateaubriand évoque le siège de Saint-Jean-d'Acre, il en appelle ainsi à un contemporain des événements pour mêler sa voix à la sienne et ainsi pouvoir rendre compte de la bataille qui a eu cours au XII e siècle : « Autrefois périt devant Saint-Jean-d'Acre la fleur de la chevalerie

. Mon-compatriote and . Guillaume-le-breton,

L. Changement, moteur de l'histoire et fabrique de son exotisme, va de pair avec un conservatisme du souvenir qui s'inscrit moins dans le texte comme imitation que comme relation entre plusieurs voix, y compris lorsque ces voix siègent en une seule personne

, J'aimerais encore à me rappeler les moeurs de mes parents, écrit le narrateur, ne fussent-elles qu'un souvenir touchant et agréable pour moi seul ; mais je me plairai d'autant plus à en retracer le tableau qu'il semblera fait d'après ces vignettes que l'on trouve dans les manuscrits du moyen âge : du temps présent au temps que je vais peindre

, L'historiographie se constitue donc comme l'une des modalités du politique et comme un laboratoire dans lequel les historiens mesurent les relations qui peuvent s'instaurer entre

C. Bernard, . Dans-honoré-de, and . Balzac, Les Chouans, op. cit, p.331

A. Prost, Douze leçons sur l'histoire, op. cit, p.263

I. Jablonka, , p.174

F. Guizot, . Essais, P. France, and . Vi, Le Brun, pensaient et écrivaient comme moi. Lanjuinais disait : « Nous avons été chercher un maître parmi les hommes dont les Romains ne voulaient pas pour esclaves

, Jacques Bony, introduction d'Alexandre Dumas, La reine Margot, op. cit, p.23

P. Mérimée, Chronique du règne de Charles IX, p.35

. François-rené-de-chateaubriand, transforme le personnage en un objet d'étude. Le lecteur est ainsi invité à faire preuve à la fois de distance dans son observation, puisqu'il ne peut pas intervenir pour aider le personnage et lui conférer le savoir dont il dispose, et d'empathie, puisqu'il doit se dépouiller un instant de son propre savoir pour essayer d'envisager ce qu'a pu penser et ce que peut faire un homme qui, p.567

. Dans-le-récit-historique, Théophile Gautier insiste sur l'ignorance de d'Albert quant à l'identité de Théodore, c'est à travers une comparaison avec le narrateur et le lecteur qu'il le fait : « Le pauvre jeune homme, écrit-il, qui n'avait pas eu, comme nous, l'avantage de fouiller dans le portefeuille de Graciosa, la confidente de la belle Maupin, n'était en état de décider affirmativement ou négativement aucune de ces importantes questions » 1121 . L'inscription d'une perte dans l'histoire a donc une valeur méthodologique, et témoigne d'une volonté d'opérer une différenciation là où l'ancienne historia magistra vitae tendait au contraire à la correspondance des époques. Autrement dit, l'historien construit non seulement ses personnages mais aussi ses lecteurs, leur donnant un savoir différent de celui des contemporains de l'époque dont il parle pour leur ouvrir un espace de distanciation et les former ainsi à la pratique historienne. L'histoire perd en constance ce qu'elle gagne en intelligibilité pour les lecteurs, un rappel incessant est fait de cette différence entre le groupe des personnages et le groupe des contemporains du narrateur, mesurant ainsi l'écart qui réside entre les temporalités et ouvrant le lecteur à la compréhension des actions des personnages de l'histoire. Lorsque, dans Mademoiselle de Maupin

. L'histoire-n'est, une interprétation unique ; palimpseste, elle s'ouvre aux témoignages de la postérité représentée par le lecteur, et gagne ainsi en polyphonie et en authenticité, puisque l'histoire se détermine alors comme mouvement et comme changement. « C'est même une erreur, affirme Volney, de regarder comme constant un fait qui n'a qu'un seul témoignage, puisque, si l'on pouvait appeler plusieurs témoins, il pourrait y survenir contradiction ou modification » 1122 . C'est pourquoi les historiens en appellent souvent à des témoignages multiples

T. Gautier and . Mademoiselle-de-maupin, , pp.467-468

C. Volney, F. Dans, and . Mcintosh-varjabédian, Écriture de l'Histoire et regard rétrospectif. Clio et Épiméthée, op. cit., p. 34. répondre d'eux-mêmes à ces sortes d'incorrections ; et c'est le même motif qui m'a porté à y revenir si souvent, p.1132

, Plutôt que de supprimer son erreur et de la remplacer par les nouvelles données qu'il a pu obtenir entretemps, il conserve l'erreur et y ajoute la correction pour donner à lire deux perspectives, composant ainsi une archive des différents points de vue et laissant le soin aux lecteurs d'effectuer le travail de hiérarchisation et de tri des documents : J'ai reçu prière du cardinal Fesch, écrit Emmanuel de Las Cases en note, de vouloir bien appliquer ici quelques redressements qui, bien que légers, lui semblaient essentiels, Les corrections qu'il peut apporter suite aux réflexions qu'on a pu lui faire après la composition du, p.1133

, Michelet, lui aussi, était fasciné par ce modèle archivistique qui réunissait en son sein une véritable historiographie qui ne manquait que d'ordre et d'équilibre. Le récit historique a donc comme objectif de mimer l'organisation des archives qui s'est mise en place pendant la Révolution française, et dont parle Michelet comme d'une histoire dans l'histoire : Le Trésor des chartes, écrit-il dans l'Histoire de France, et la partie de beaucoup la plus considérable des Archives (section historique, domaniale et topographique, législative et administrative), Le Mémorial se constitue donc comme un réservoir d'archives dans lequel tout document, y compris ceux qui sont mensongers, peuvent avoir une valeur historique

, à la manière d'un palimpseste, succède à l'ancien sans pour autant le supprimer tout à fait : « j'ai voulu conserver ce que j'écrivais alors, précise Las Cases, comme un témoignage de l'impression du moment, et si aujourd'hui j'y ai ajouté de nouveaux détails, c'est que je me les suis trouvés sous la main, et que j'ai pensé qu'il était précieux de les consigner comme historiques » 1135, La note de bas de page qui corrige les erreurs ou nuance les propos fait figure de nouveau texte qui, p.1238

J. Michelet, Histoire de France, t. 2, op. cit, p.435

, « Si la rectification n'a pas été faite ici, au texte même, écrit plus loin Las Cases à propos d'une erreur sur le général Drouot, c'est par l'extrême désir de s'éloigner le moins possible de la publication primitive, p.457

. Metz-»-1145-.-c'est-plutôt-sur-la-géographie-que-joue-quant-À-lui-balzac-qui, lorsqu'il décrit le château royal de Plessis-lès-Tours, lui donne une position différente en fonction de l'auteur qui l'évoque. Il s'oppose ainsi à Walter Scott tout en rappelant l'emplacement que l'historien écossais avait donné de l'édifice : Malgré la singulière fantaisie que l'auteur de Quentin Durward a eue de placer le château royal de Plessis-lès-Tours sur une hauteur, explique Balzac, il faut se résoudre à le laisser où il était à cette époque

, puis par le canal Sainte-Anne, ainsi nommé par Louis XI en l'honneur de sa fille chérie, p.1146

, Comme un palimpseste, la France comprend en son sein des territoires moins visibles qui néanmoins secondent le territoire national et disent quelque chose de son histoire et de sa transformation à travers l'histoire

. France and F. De-la, Elle siège au milieu de ses filles, la Wallone, la Savoyarde, etc. La France mère a changé ; ses filles ont peu changé (au moins relativement) ; chacune d'elles représente encore quelqu'un des âges maternels. C'est chose touchante de revoir la mère toujours jeune en ses filles, d'y retrouver, en face de celle-ci, sérieuse et soucieuse, la gaieté, la vivacité, la grâce du coeur, tous les charmants défauts dont nous nous corrigeons et que le monde aimait en nous, p.1147

, Islande 1148 , qualité que lui reconnaissait d'ailleurs Charles Nodier lorsqu'il écrivait de lui que « la connaissance particulière des lieux ou des études très bien faites ont donné jusqu'à un certain point à l'auteur d'Han d'Islande cette piquante vérité de couleur locale qui distingue l'auteur de Waverley » 1149 . Pour Hugo, l'utilisation du palimpseste pour rendre compte des monuments historiques ne se fait pas seulement à partir des traces écrites et langagières, mais aussi à partir de la géographie et du souvenir que l'histoire, « Je passai beaucoup de temps à amasser pour ce roman des matériaux historiques et géographiques », écrit Victor Hugo dans Han d

J. Michelet, Précis de l'histoire de France, op. cit, p.43

M. Honoré-de-balzac and . Cornélius, , pp.85-86

J. Michelet, Histoire de France, t. 6, op. cit, p.99

V. Hugo and O. Han-d'islande, , p.524

C. Nodier and . Dans-ibid, , p.528

, comporte ainsi en son sein d'autres existences cachées qui ne se dévoilent qu'à celui qui a pu étudier l'histoire et qui peut ainsi lire le palimpseste derrière la réalité architecturale contemporaine : Les personnes qui, comme nous, écrit le narrateur de Notre-Dame de Paris, ne passent jamais sur la place de Grève sans donner un regard de pitié et de sympathie à cette pauvre tourelle étranglée entre deux masures du temps de Louis XV, peuvent reconstruire aisément dans leur pensée l'ensemble d'édifices auquel elle appartenait, p.1150

, Lorsque Balzac, dans Sur Catherine de Médicis, argumente pour prouver aux lecteurs que le vieux Louvre n'existait pas sous Charles IX, il finit par dire : « Quand même les savants et les bibliothèques ne posséderaient pas de carte où le Louvre sous Charles IX est parfaitement indiqué, le monument porte la réfutation de cette erreur » 1152 . Si Claude Frollo apprécie tant Notre-Dame, c'est donc non pas tant pour son aspect architectural que pour le palimpseste qu'il devine derrière la façade de l'imposant édifice, « pour le symbole épars sous les sculptures de sa façade comme le premier texte sous le second dans un palimpseste » 1153 : Et puis, pourrait-il dire comme Michelet dans ses Cours au Collège de France, quand je parcours la ville, quand j'étudie son histoire par les monuments, « Quand on sait voir, ajoute-t-il, on retrouve l'esprit d'un siècle et la physionomie d'un roi jusque dans un marteau de porte » 1151

L. Frollo-répond-À-coictier-«-ceci-tuera-cela and ». , appréhension de l'histoire, l'érudition livresque succédant à la perception sensorielle qui permettait autrefois de déchiffrer le monde. L'historiographie de la première moitié du XIX e siècle témoigne donc d'un retour au sensualisme de la pratique historienne qui ne se déprend pas pour autant de l'érudition livresque et du travail sur les sources. L'historien lit et travaille sur des documents, avant de composer un récit qui met en scène la pratique historienne sous la forme d'un voyage sensoriel qui réinvestit le réel et place le lecteur dans une situation de transmission immédiate, p.130

B. Honoré-de, Sur Catherine de Médicis, op. cit, p.389

V. Hugo, , p.261

J. Michelet, C. Au-collège-de, and F. , c'est l'homme uni. Par la force ?... Non, grâce à l'immensité de l'Empire, le plus bel ouvrage humain, p.95

L. , historiographie ne tient donc pas seulement dans la juxtaposition des voix du passé ; il se révèle également dans les paysages que la pratique historienne offre aux lecteurs par le biais de l'historiographie. Faire de l'histoire, ce n'est pas seulement travailler sur des livres ou des documents : c'est l'apprentissage d'un regard qui perçoit les symboles et qui sait lire le réel qui se dévoile aux yeux des historiens. Le palimpseste du paysage de l'histoire établit donc une connexion entre l'historien et ces monuments du passé, car on y découvre le lien profond qui unit la nation à chacun des édifices du territoire français : Nous avons là, proclame Michelet, dans ces édifices

. Quoi-!-prêtre, quand vous mettez sur cette église votre main impie, elle ne vous dit donc rien ? C'est à nous impies qu'elle parle, et c'est nous qui serons obligés de la couvrir de la main, p.1159

, La communauté s'identifie donc moins comme la résultante d'une histoire que comme l'établissement d'une relation avec ce passé, dans un processus actif : « en étudiant l'histoire, écrit Michelet, nous devons en rester libres. L'histoire c'est ce que nous faisons, c'est notre oeuvre, non notre tyran » 1160 . Pour Michelet, c'est la Révolution qui est à l'origine de cette nouvelle relation qui s'instaure entre les temporalités, et qui a donné aux siècles passés comme aux contemporains une plus grande visibilité : C'est pourtant la Révolution qui, seule, a rendu l'histoire possible. Elle a mis les hommes en face pour se juger, se comparer : l'armée d'Italie et celle de Sambre-et-Meuse, la Montagne et la Gironde. Elle a mis les choses en face, avec la centralisation des manuscrits, Cette appréhension de l'histoire consacre donc l'apparition d'un « nous », d'une communauté qui s'établit dans le rapport qu'elle entretient avec cette polyphonie du paysage historique, p.1161

C. Le-proclame-michelet-au-collège-de and F. , « le but futur du monde, c'est de réconcilier, d'interpréter tous les éléments antérieurs » 1162

J. Michelet, C. Au-collège-de, and F. , , vol.2, p.43

C. De, Si le régime d'intelligibilité et de communication de l'histoire a changé, donnant à l'interaction des siècles une plus grande visibilité, les matériaux sur lesquels peuvent travailler les historiens ont parfois été détruits

C. , pour répondre à cette situation ambivalente de mise en visibilité méthodologique et de destruction des monuments de l'histoire, les historiens transforment les anciens édifices en ruines et en font par conséquent le support d'une lecture qui va par-delà l'apparence : « la Révolution s'en est prise aux lieux célèbres, écrit Chateaubriand dans ses Mémoires, 1163.

, Le livre, ce sont nos provinces ravagées par l'étranger » 1164 . Ce sont ces souvenirs qui forment un texte second que l'historien va apprendre à voir à travers les ruines. La visualisation de l'histoire relève donc d'un déchiffrement indiciaire : il s'agit moins d'observer que de chercher, moins d'établir des mesures que de relever des traces, comme l'écrivait Michel de Certeau : Tel Robinson Crusoé sur la grève de son île, devant le « vestige d'un pied nu empreint sur le sable », l'historien parcourt les bords de son présent, « Ce ne sont point les savants qu'il faut consulter ici, écrit également Michelet dans l'Histoire de la Révolution française, ni les livres de droit public

, Ainsi se produit le discours qu'organise une présence manquante, p.1165

, Non seulement l'ancienne Italie n'est plus, écrit par exemple Chateaubriand, mais l'Italie du moyen âge a disparu. Toutefois, la trace de ces deux Italies est encore marquée dans la Ville éternelle : si la Rome moderne montre son Saint-Pierre et ses chefs-d'oeuvre, la Rome ancienne lui oppose son Panthéon et ses débris ; si l'une fait descendre du Capitole ses consuls, l'autre amène du Vatican ses pontifes. Le Tibre sépare les deux gloires : assises dans la même poussière, Rome païenne s'enfonce de plus en plus dans ses tombeaux, Chateaubriand obéit à ce mouvement de la pratique historienne et se met ainsi en quête des traces laissées par les monuments ou les paysages historiques, p.1166

. François-rené-de-chateaubriand, , p.95

J. Michelet, Histoire de la Révolution française, t. 2, op. cit, p.15

C. Michel-de, cité par François Hartog dans Évidence de l'histoire. Ce que voient les historiens, p.297

. François-rené-de-chateaubriand, , p.124

F. Dans-le-précis-de-l'histoire-de, Michelet témoigne d'un même travail de visualisation des indices qu'a pu laisser l'histoire en Italie : Lorsqu'on traverse aujourd'hui les Maremmes de Sienne, et que l'on trouve en Italie tant d'autres traces des guerres du seizième siècle, une tristesse inestimable saisit l'âme, et l'on maudit les barbares qui ont commencé cette désolation. Ce désert des Maremmes, c'est un général de Charles-Quint qui l'a fait ; ces ruines de palais incendiés sont l'ouvrage des landsknechts de François Ier, Ces peintures dégradées de Jules, p.1167

. L'histoire-s'impose-par-conséquent-À-l'historien and . Lui, Ce second texte qu'est celui de l'histoire surgit ainsi en plein coeur de l'histoire de la vie quotidienne et privée du personnage, comme en témoigne Chateaubriand avec les Mémoires d'outre-tombe. Quelques mots ou quelques lignes d'un article de journal peuvent ainsi témoigner d'une histoire en marche pour celui qui sait voir et entendre ces traces encore fugitives qui ne seront mises au jour que plus tard : Je descendis dans l'hôtel où M. le comte de Boissy, mon ancien secrétaire de légation, m'avait arrêté un logement, raconte par exemple Chateaubriand. Je m'habillai et j'allai chercher madame Récamier. Elle occupait un appartement dont les fenêtres s'ouvraient sur la grève. J'y passai quelques heures à causer et à regarder les flots. Voici tout à coup venir Hyacinthe ; il m'apporte une lettre que M. de Boissy avait reçue, et qui annonçait les ordonnances avec de grands éloges, Ses traces sont fugitives mais permanentes et parfois obsédantes, si bien qu'elle fait parfois irruption sans qu'elle ne soit ni prévue ni souhaitée, p.1168

, Impossible pour l'historien de se détourner de cette histoire qui surgit tout à coup, comme il est impossible pour Michelet, dans l'Histoire de la Révolution française, de se détourner des traces que les rois coupables ont laissées de leurs exactions

J. Michelet, Précis de l'histoire de France, op. cit, p.181

. François-rené-de-chateaubriand, , pp.455-456

, souligne Claudie Bernard, l'appel du chat-huant fonctionne à la fois comme signal pour les combattants et comme indice pour le lecteur : « sombre avis » (p. 172), il prélude immanquablement à quelque retournement de situation » 1174 . Les marques d'historicité, pour reprendre la terminologie d'Antoine Prost, varient donc selon les destinataires à qui s'adresse le narrateur-historien : L'apparat critique, précise l'historien, est cependant moins discriminant qu'il ne semblait au premier abord. Son absence ou sa présence -et son ampleur, constitue également comme un signal à destination d'un lecteur qui appartient à un autre temps et à un autre lieu que celui du récit : « dans le texte, p.1175

C. Bernard, Introduction à Honoré de Balzac, Les chouans, op. cit, p.33

A. Prost, Autrement dit, la subjectivité est prégnante dans le récit historique de la première moitié du siècle, une subjectivité qui réside moins dans l'affirmation identitaire d'un auteur que dans la prise de parole individuelle et subjectivée de tous les personnages de l'histoire. Si la polyphonie n'amoindrit pas l'exotisme, c'est parce que les voix de l'histoire font entendre leur subjectivité, c'est-à-dire leur singularité, là où la revendication objective conduira plus tard l'histoire à un amoindrissement communicationnel, et par conséquent à une perte d'exotisme. En ce sens, l'apparition de l'école méthodique, à la fin du siècle, pourrait paradoxalement signer le retour à une pratique plus monarchique de l'histoire, dans laquelle les voix de l'histoire s'amoindrissent pour faire entrer le récit historique dans le modèle du monologue. En effet, en expulsant la littérature de l'histoire, acte fondateur qui va de pair avec le rejet de la tradition orale 1176 , la discipline historique expulse également les deux fonctions qui servaient d'interlocuteurs privilégiés du passé avec l'espace contemporain : l'auteur et le lecteur. En mettant fin au système des belles-lettres, l'histoire gagne en précision là où elle perd en polyphonie, c'est-à-dire en intelligibilité et en transmissibilité. Le récit historique ne sera dès lors plus l'écriture d'une rencontre : toute interactivité est bannie du domaine de la narration historique. Le didactisme souffre par conséquent d'une érudition qui institue une histoire monofonctionnelle, là où le récit historique de la première moitié du siècle cherchait un équilibre entre la véracité et la transmissibilité du discours. Dès lors, en adoptant le modèle positiviste et naturaliste, l'histoire devient science et adopte un paradigme qui ne relève plus que de la recherche d'exactitude, Douze leçons sur l'histoire, op. cit., p. 264. temporalités, là où l'histoire doit toujours s'efforcer de conserver l'exotisme qui autorise une différenciation elle-même facteur de communication. C'est pourquoi la figure de l'auteur et de l'historien n'a pas disparu : il s'agit moins d'annoncer la mort de l'auteur que sa démultiplication au sein du récit

, Le récit historique de la première moitié du XIX e siècle est un récit inachevé : c'est l'expérience d'un échec, ou du moins d'une marche qui n'est pas parvenue à trouver son point d'ancrage. Mais c'est donc aussi un récit dynamique et mouvant, dont le commencement et la fin ne sont pas réellement discernables

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